À Libreville, les récentes opérations de déguerpissement dans la zone dite Plaine-Oréty, située derrière l’Assemblée nationale, suscitent une vive controverse. Plusieurs formations politiques, des membres du Parlement de transition et des figures de la société civile appellent à la création d’une commission d’enquête parlementaire. Ils dénoncent la brutalité et la précipitation des expulsions, ainsi que la destruction soudaine des habitations.
Plus d’une semaine après l’intervention des engins du génie militaire, les gravats n’ont pas été dégagés et certaines familles passent encore la nuit à la belle étoile. La proximité de cette intervention avec le siège de l’Assemblée nationale a choqué de nombreux parlementaires. L’Union nationale, dirigée par la présidente du Sénat Paulette Missambo, ainsi que le parti Réagir, présidé par Michel Ongoundou Loundah, réclament des investigations sur les conditions d’exécution de ces déguerpissements.
Le député Lionel Engonga, résident de l’arrondissement concerné et issu de la société civile, s’interroge sur la précipitation de l’État alors que le processus judiciaire n’était pas arrivé à son terme. « Le tribunal avait demandé la présentation du titre foncier du quartier et une expertise contradictoire. Il s’agissait donc d’une décision provisoire. Pourtant, les destructions ont eu lieu immédiatement. J’ai rencontré des familles en larmes, dont certaines n’avaient même pas été informées. Des nouveau-nés dorment aujourd’hui dehors, avec leurs parents », déplore-t-il. Il regrette également l’absence de transparence sur la liste des personnes qui devraient être indemnisées.
« Transformer une ville, oui. Mais pas en humiliant les gens »
Ike Ngouoni, ancien conseiller à la présidence, a profité du lancement de son nouveau parti politique, Les Engagés, pour réagir. Il appelle à concilier modernisation urbaine et respect de la dignité humaine. « Il faut un plan d’aménagement cohérent pour les vingt prochaines années. Mais dans la mise en œuvre, il est indispensable de respecter les citoyens. Transformer une ville, oui. Mais pas en humiliant les gens. Une solution immédiate serait de mettre en place un comité de suivi indépendant, composé de représentants des quartiers, pour garantir la transparence et la justice dans les opérations en cours », affirme-t-il.
De son côté, le gouvernement justifie l’opération par la nécessité de fluidifier la circulation, de réduire les risques d’inondation et de lutter contre le mal-logement. Le site dégagé devrait à terme accueillir une cité administrative ainsi que le futur « boulevard de la Transition ».