L’Afrique fait face à une crise énergétique majeure, avec 600 millions de personnes privées d’accès à l’électricité et 900 millions sans solutions de cuisson propres. Face à cette réalité, l’idée selon laquelle le continent pourrait satisfaire ses besoins énergétiques sans recours aux hydrocarbures est une illusion dangereuse. Si les nations occidentales accélèrent leur transition vers les énergies renouvelables, cette approche ne peut être imposée uniformément à l’Afrique sans prendre en compte ses spécificités économiques et infrastructurelles.
Pourquoi les hydrocarbures restent essentiels au développement africain
Des institutions telles que l’Agence internationale de l’énergie (AIE) continuent de prôner un abandon rapide du pétrole et du gaz au profit des énergies renouvelables. Or, une telle transition, menée sans préparation et sans investissements massifs dans les infrastructures, risquerait d’aggraver la précarité énergétique du continent.
Lors du 15e Symposium IEA-IEF-OPEP à Riyad, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer ces injonctions déconnectées des réalités africaines. Parmi elles, Tommy Joyce, secrétaire adjoint par intérim aux affaires internationales au sein du Département américain de l’Énergie, a souligné le rôle crucial du pétrole et du gaz dans la lutte contre la pauvreté énergétique en Afrique. D’autres personnalités, comme le ministre saoudien de l’Énergie Prince Abdulaziz bin Salman et le secrétaire général de l’OPEP Haitham Al-Ghais, ont insisté sur la nécessité d’une approche pragmatique et adaptée.
Le rôle du gaz naturel : une transition pragmatique ?
L’Afrique ne peut pas reproduire à l’identique le modèle occidental de transition énergétique sans risquer de s’enfoncer davantage dans la précarité énergétique. Son économie repose encore largement sur les hydrocarbures, et ses infrastructures ne permettent pas un passage immédiat aux énergies renouvelables.
L’Afrique du Sud, par exemple, tire 72 % de son électricité du charbon et subit de lourds délestages qui paralysent son industrie et sa croissance économique. Pourtant, une solution plus propre et plus viable existe : le gaz naturel.
Avec plus de 620 000 milliards de pieds cubes de réserves prouvées et de vastes bassins encore sous-explorés, le gaz pourrait devenir un levier clé pour l’industrialisation du continent. Les projets de production d’électricité à partir du gaz offriraient une alternative fiable et à faible émission carbone. Ils permettraient non seulement de répondre à la demande intérieure, mais aussi d’exporter vers les pays voisins en déficit énergétique, comme le Zimbabwe.
Cependant, l’AIE recommande l’arrêt de nouveaux projets gaziers sous prétexte que les champs existants suffiraient à la demande mondiale. Pourtant, la situation sur le terrain contredit cette affirmation.
L’Afrique du Sud et le Mozambique illustrent cette contradiction : malgré d’importants investissements dans l’hydroélectricité, seul 40 % de la population mozambicaine a accès à l’électricité. Or, avec des réserves de gaz estimées à plus de 100 000 milliards de pieds cubes et des projets de GNL en plein essor, le pays pourrait considérablement améliorer son taux d’électrification grâce à une approche énergétique diversifiée. Il en va de même pour d’autres nations comme l’Angola, la Tanzanie, le Sénégal, la Mauritanie et la République du Congo.
Une transition énergétique adaptée aux réalités africaines
Les pays africains sont les mieux placés pour répondre à leurs propres besoins énergétiques. Si le pétrole et le gaz sont souvent perçus comme des énergies à bannir dans les grandes capitales occidentales, ils restent des alternatives plus propres que la biomasse solide et le kérosène, encore utilisés par 85 % des Africains pour cuisiner.
Pour mettre fin à la pauvreté énergétique en Afrique, il est impératif que les grandes institutions cessent de véhiculer l’idée que le continent peut se passer des énergies fossiles sans conséquences graves sur son développement économique. Les pays industrialisés ont alimenté leur croissance avec le charbon, le pétrole et le gaz, permettant des avancées majeures en matière de santé, d’espérance de vie et de sécurité alimentaire.
Pourquoi l’Afrique ne pourrait-elle pas suivre une trajectoire similaire, adaptée à ses besoins et à ses ressources ? L’Afrique doit-elle suivre la voie des pays développés en matière de transition énergétique ou adapter son propre modèle ?