Marie-Do Aeschlimann, sénatrice (LR) des Hauts-de-Seine, est très engagée dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. Il y a quelques mois, à l’initiative d’Arash Derambarsh, adjoint au maire de Courbevoie (Hauts de Seine), elle a reçu au Sénat l’acteur Mathieu Kassovitz et le rappeur Sefyu pour discuter du renforcement de la législation en la matière. Cette initiative vise à agir concrètement pour limiter le gaspillage alimentaire en France tout en favorisant une meilleure redistribution des ressources. Rencontre avec cette parlementaire inspirante.

54 ÉTATS : À l’initiative d’Arash Derambarsh, vous avez récemment rencontré des personnalités influentes du monde de la culture, telles que l’acteur Mathieu Kassovitz et le rappeur Sefyu, pour aborder la question du gaspillage alimentaire. Quelles actions concrètes ont émergé de ces échanges, et comment ces collaborations peuvent-elles faire avancer la cause ?
Marie-Do Aeschlimann : J’ai décidé d’unir mes forces à Arash Derambarsh, Mathieu Kassovitz et Sefyu qui sont très engagés sur cette cause. Ils ont la volonté de faire bouger les lignes. Nous partageons le constat que :
Le gaspillage alimentaire est toujours un enjeu d’une actualité brûlante en dépit des lois mises en oeuvre ces dernières années
Tout le monde doit se mobiliser et adopter des pratiques responsables pour réduire le gaspillage ou encourager les dons aux associations. Il apparait aujourd’hui nécessaire de renforcer notre arsenal législatif pour sensibiliser et impliquer davantage tous les acteurs de la chaîne alimentaire. Pour relever ce défi, c’est évidemment important de pouvoir compter sur ces personnalités engagées.
54 ÉTATS : La loi du 11 février 2016, qui sanctionne les supermarchés de plus de 400 m² pour le gaspillage alimentaire, touche actuellement seulement un tiers de la grande distribution. La prochaine législation vise à abaisser ce seuil à 200 m². Comment cette évolution va-t-elle permettre de mieux lutter contre le gaspillage alimentaire ?
Marie-Do Aeschlimann : Faire évoluer la loi en abaissant le seuil des magasins concernés permettrait d’intégrer quelques 5 000 commerces de proximité au nombre des établissements concernés. L’action d’Arash Derambarsh et de Jacques Kossowski à Courbevoie montre que le gaspillage alimentaire n’est pas une fatalité. Dans cette ville des Hauts-de-Seine, 500 000 repas ont été économisés et redistribués en 5 ans grâce à des chartes d’engagement signées avec des acteurs locaux au profit d’associations qui reçoivent ces dons alimentaires. C’est une bonne chose que cette initiative ait été saluée par une agence onusienne (la FAO).
54 ÉTATS : L’amende pour les supermarchés de plus de 200 m² passerait de 10 000 à 20 000 euros. Pensez-vous que ces sanctions, accompagnées de l’extension des sanctions à plus de 5 000 points de vente, auront un réel impact sur la réduction du gaspillage alimentaire en France ?
Ma proposition de loi prévoit de durcir les sanctions contre les entreprises qui rendraient les denrées alimentaires impropres à la consommation
C’est une pratique intolérable. Actuellement une amende forfaitaire est fixée à 0,1 % maximum du chiffre d’affaires, avec cette loi l’amende pourrait aller jusqu’à 0,5 % du chiffre d’affaires. C’est dissuasif. Mais ce n’est qu’un des aspects de cette proposition de loi, l’objectif premier est d’impliquer plus largement tous les acteurs dans la lutte contre ce fléau.
54 ÉTATS : Envisagez-vous d’autres mesures législatives ou actions concrètes pour renforcer davantage la lutte contre le gaspillage alimentaire, au-delà des sanctions appliquées aux grandes surfaces ?
Marie-Do Aeschlimann : Malgré les évolutions législatives à l’oeuvre depuis une dizaine d’années, il persiste une certaine opacité concernant l’étendue réelle du gaspillage alimentaire en France. Ce constat, je l’ai partagé avec de nombreux acteurs et experts. Tous s’accordent sur un point : faute d’outils précis et de données fiables, il est très compliqué d’évaluer correctement la réalité du gaspillage et le chemin parcouru.
Pour être plus efficaces, il nous faut impérativement améliorer la transparence
C’est pourquoi ma proposition de loi vise à obliger les opérateurs concernés – industrie agroalimentaire, distributeurs, restauration collective – à partager annuellement leurs données sur les quantités de denrées gaspillées. Ils devront également rendre compte des dons réalisés. Cela nous permettra non seulement de mieux évaluer les progrès réalisés, mais également de cibler les secteurs où les efforts doivent être intensifiés.