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mercredi, janvier 15, 2025

Madagascar : les chefs religieux dénoncent la classe dirigeante dans un message incisif

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Isaga Anne
Isaga Anne
Journaliste Reporter d'Images

À Madagascar, les chefs religieux se sont démarqués par des discours marquants à l’occasion des fêtes de fin d’année. Fidèles à la tradition, ces allocutions, bien que spirituelles, ont pris un ton résolument critique en abordant les réalités nationales. Cette année, les deux principales Églises du pays ont adopté une posture frontale.

L’une a pointé du doigt l’hypocrisie des dirigeants, tandis que l’autre a adressé de sévères reproches à une classe politique accusée de s’accrocher au pouvoir, sans toutefois la nommer explicitement. Ces critiques ouvertes surviennent dans un contexte post-électoral tendu, où le climat politique est marqué par des doutes croissants sur la transparence des élections municipales du 11 décembre 2024.

Ces positions ont suscité de vives réactions au sein du régime en place, illustrant les tensions qui règnent à l’heure où la société civile et l’opposition dénoncent la crédibilité du processus électoral. À travers leurs prises de parole, les responsables religieux semblent jouer un rôle croissant en tant que vigies de la conscience nationale, interpellant sur des enjeux dépassant le cadre purement spirituel.

Les discours religieux qui bousculent la trêve des fêtes

Le message publié le 24 décembre a rapidement perturbé la sérénité habituellement associée à la période des fêtes. « Que Noël ne soit pas comme celui d’Hérode, ce roi aveuglé par le pouvoir, un fou qui cherchait par tous les moyens à dissimuler la vérité », a lancé le président de l’Église protestante FJKM, le pasteur Irako Ammi Andriamahazosoa. En invoquant la figure historique du roi de Judée, il a mis en garde les dirigeants malgaches contre les dérives tyranniques, faisant écho aux préoccupations grandissantes de la population.

Des critiques mal reçues par le régime

Ces paroles ont été perçues par la présidence de la République comme des « attaques déguisées ». Réagissant à ces propos, la porte-parole de la présidence, Lova Ranoromaro, a exhorté l’Église à « jouer son rôle de rassembleur et à éviter d’alimenter la haine ».

Quelques jours plus tard, le 31 décembre, l’Église catholique, généralement perçue comme proche du président Andry Rajoelina, a également pris position. Dans un message plus mesuré mais tout aussi ferme, le cardinal Désiré Tsarahazana a déclaré : « Crier ‘Alléluia’ et ‘Amen’ ne signifie rien si nous continuons à perpétuer le mal. » Ce commentaire faisait implicitement référence aux scandales récents, notamment l’arrestation d’un député et de trois fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères dans des affaires de trafic de lingots d’or et de tortues.

L’Église, une voix d’espoir dans un contexte de crise

Ces prises de position des leaders religieux résonnent fortement dans une société malgache confrontée à de graves difficultés. Alors que l’opposition peine à se faire entendre et que le parti présidentiel domine la scène politique, l’Église s’impose comme un pilier moral et un refuge pour une population accablée par la hausse du coût de la vie, les coupures récurrentes d’eau et d’électricité, et les scandales politico-économiques.

En relayant des préoccupations largement partagées, les chefs religieux rappellent aux dirigeants leurs responsabilités envers le peuple, tout en incarnant l’une des dernières voix capables de rassembler et d’influencer une nation en quête de justice et d’équité.

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